Réunis jeudi 9 octobre en assemblée plénière, les élus du conseil général de Martinique ont adopté à l'unanimité une motion "exigeant la déclaration de catastrophe naturelle pour l'ensemble du département" en raison d'une invasion d'algues sargasses*, un phénomène naturel devenu exceptionnel par son ampleur, conséquence de dérèglements courantologiques anormaux selon des spécialistes.
Si le phénomène sargasses n'est pas nouveau - le sud de l'île avait été particulièrement touché en 2011 par des kilomètres d'algues échouées -, les habitants comme les élus ne souhaitent pas revivre l'épisode dans les mêmes conditions. Pendant plusieurs mois en effet, les algues s'étaient accumulées sur les plages parfois jusqu'à rendre toute baignade impossible, dégageant des odeurs pestilentielles, et perturbant les activités économiques des commerçants et des professionnels de la mer. Ce jeudi, les élus ont évoqué dans leur motion, une "ampleur grandissante du phénomène et des répercussions sur la santé et les biens des personnes ainsi que sur les activités scolaires, économiques et touristiques". Si les algues en elles-mêmes ne sont pas toxiques, une fois échouées sur les plages elles engendrent des dégagements importants de gaz, notamment de sulfure d'hydrogène (gaz inflammable toxique, incolore, à l'odeur d'œuf pourri) qui peuvent être à l'origine de nuisances olfactives, gênes respiratoires pour les personnes fragiles et de troubles sanitaires pour les promeneurs et les riverains. Une dizaine d'élèves du lycée professionnel agricole de Four à Chaux au Robert, commune qui concentre la plus forte quantité d'algues sargasses, ont été hospitalisés le 8 octobre et l'établissement fermé jusqu'au lundi 13, en raison des fortes nuisances provoquées par l'hydrogène sulfuré dégagé par le pourrissement des algues. L'agence régionale de santé a rappelé néanmoins, afin de rassurer la population à risque, que ces algues n'ont pas davantage de conséquence sur les personnes asthmatiques que d'autres odeurs.
Dans leur motion, les conseillers généraux demandent en outre la "mise en oeuvre massive des moyens de l'Etat tant logistiques qu'humains" comme des "filets anti-pollution" et des "barges avaleuses d'algues". Par ailleurs, ils souhaitent également le concours de l'Etat pour lancer des études et explorer "des pistes de valorisation de ces algues sargasses et permettre la création de filières innovantes".
Lors d'une conférence de presse le 26 août l'Assaupamar et le Centre caribéen de développement durable et solidaire (CD2S) avaient simultanément lancé l'alerte en direction des pouvoirs publics concernant les échouages massifs de sargasses et estimé que ces produits étaient exploitables, à la lumière des expériences réalisées ailleurs (valorisation de l'algue sur le plan pharmacologique, dans l'industrie agroalimentaire et cosmétique ou même dans l'horticulture, avaient-ils souligné).
En attendant de pouvoir peut-être un jour exploiter ces envahisseuses, depuis mardi, des militaires munis de moyens de protection respiratoire sont sur place dans le quartier Pontalery, au Robert, et procèdent aux ramassages des algues. Une décision prise par le préfet de Martinique, Fabrice Rigoulet-Roze, afin de faire face à la dégradation des taux d'hydrogène sulfuré mesurés lundi dans la région.
Par ailleurs, l'ARS de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy, mais aussi la Guyane ont également signalé des dépôts massifs d'algues brunes (sargasses) sur leur territoire.
Sandrine Toussaint avec AFP
* Ces algues proviennent de la haute mer. Elles y vivent sous forme libre et suivent des courants marins qui les dirigent actuellement sur les côtes martiniquaises préférentiellement vers la zone atlantique mais aussi parfois jusque sur la côte Caraïbe.
ncG1vNJzZmivp6x7o63NqqyenJWowaa%2B0aKrqKGimsBvstFooKeukai2sLqMnZiln6WawG6%2FwKuemqujmsBusc1mpJqqpJ67qr3UnmSlnV2YvK%2B%2FxKKjZp%2BVo7KzrctmqZ6bnJa6pnnLnquarF2Zsm6vwK2YrKyipL2psYynmK2topq5rbE%3D